András Schiff et les Solistes de l'Orchestre de Chambre d'Europe en concert à la fondation Louis Vuitton
- Il y a bien longtemps je fus allocataire de recherche (c'est le titre) en biologie animale et mon activité principale consistait en travaux d'histologie, histochimie. Il s'agissait d'identifier des tissus sur des préparations obtenues selon une technique classique, par découpage au microtome de portions d'animaux qu'on avait fixés - les animaux ou un organe - et colorés. C'était une activité précise mais tranquille, à l'abri des bruits de la cité, dans un petit monde feutré, celui des laboratoires (on disait le labo), que j'aimais bien.
L'une des techniques de coloration, permettant de reconnaître la présence de glucides, c’était la réaction de Schiff, du nom de celui qui l'avait créée et expliquée.
On disposait de plusieurs "batteries" de pots de verre, des cylindres pourvue d'un chapeau emboîtant le sommet et le haut du pot ...
Les tubes de Borel étaient rangés par six dans des supports en bois et on trempait ses lames, de gauche à droite, successivement dans chacun des pots. Une batterie pour les colorations, une après pour revenir en milieu non aqueux avant l'application de Baume du Canada le plus transparent des milieux !
Mais ... là j'ai dérivé, un souvenir est venu remplacer une idée, peut-être plus difficile à exprimer. Je vais essayer de la retrouver. Le but c'était de donner un petit conseil sans que ce soit trop voyant, cousu de fil blanc. Et là la belle couleur du Schiff est arrivée, si belle et mêlée à tant de bons souvenirs qu'elle a chassé mon pauvre fil blanc.
Comment faire ? l'idée, ce conseil qui n'ose pas dire son nom, c'était : tu es devant une corvée, pas du tout envie de t'y atteler et tu exprimes ton mépris, ton indifférence. Et tu as parfaitement raison de le penser et de le dire. Au passage, tu te fais plaisir, et pourquoi pas, mon Dieu ?
Seulement voilà, ce plaisir momentané risque de te coûter plus cher que le désagrément qui verrait il Signore Plaisir remisé, oublié pour un moment. Souci vénal, plaire au jury etc. Et pour le faire, je crois qu'il te faudrait aimer cette corvée, la rédaction. Tu sais, je connais cette masse qui vous oppresse, vous ensommeille, vous empêche d'y aller, vous offre tout un éventail d'arguments ... Bien sûr, bien sûr.
Alors pour disons faire la pute, jusque pour quelques jours, tu oublies que c'est une corvée. Tu te rappelles, à l'origine, c'est toi qui as choisi ce sujet, d'après tes observations sur le vif, les réactions, tes gestes. Et tu aimes aider, soulager, prendre la main de quelqu'un. Et puis c'est tout, tu penses au geste, et tu racontes le plus simplement possible, comme tu m'en as parlé un jour.
Et pardon si je suis indiscrète et marche sur tes plates-bandes ...